Des images me revinrent à l'esprit. Le corps de ma mère morte. L'incendie à l'orphelinat. Ces brûlures que je portais depuis des années maintenant étaient témoin de mon combat sans fin contre cet élément primaire. Pourquoi me pourchassait-il, je n'avais rien fait. Il était toujours présent, même dans le meilleure des moment. Alors que je pensais m'amuser ce soir, il avait fallu qu'il vienne tout gâcher.

Comme d'habitude, j'avais pété un plomb à la vue de ces flammes rougeoyantes. Rien que d'y repenser, j'eu la nausée quelques instants. Ce n'était pas pour rien que personne n'avait voulu m'adopter avant ma majorité, alors que j'étais à l'orphelinat. Les gens avaient peur de moi parce que j'étais incapable de me contrôler devant une simple flamme. Alors imaginez, devant un feu de cheminer ! Cela pourrait paraître banal pour d'autres, mais pour moi il s'agissait de mon plus grand cauchemar. Visualiser ce feu de cheminer me fit pleurer de plus belle, et je sentis mon corps secoué de tremblements terribles. Folle. Hystérique. Je faisais peur à voir, et j'en avais conscience.

-Excusez-moi ? Je sais que cette question paraît stupide mais est-ce que vous allez bien ? Que vous arrive-t-il ?

J'eu un mouvement de recul lorsqu'une voix féminine et douce mit fin à mes pensées bien sombres. Je tentais de la regarder, mais impossible avec toutes ces larmes qui me brouillaient la vue. Remarquant que d'autres me dévisageaient, je finis par essayer de me relever et, d'un pas tremblant et faible, m'éloignais de la soirée. Une limace aurait pu me rattraper tellement ma marche était lente. J'avais l'impression d'avoir vécu l'enfer dans cette pièce, et qu'on avait attaché un boulet à mon pied tellement je me sentais vidée de toute énergie. Après quelques mètres plus loin, je pris appui sur le premier arbre que je trouvais, épuisée. La jeune femme qui m'avait adressé la parole me regardait toujours, inquiète. Qui était-elle ? Une Déesse peut-être ? Ce serait le pompon, et voilà que j'aurai manqué de respect à une Déesse en ne lui répondant pas ! Je me remis à pleurer à cette pensée. Plus rien n'allait ce soir, et visiblement, l'inconnue sembla s'en rendre compte aussi puisqu'elle vint à moi une deuxième fois.

Perturbée. Esseulée. Fatiguée. Ecoeurée. Fragilisée. Malmenée. Les mots ne manquaient pas pour traduire mon mal être. Je tremblais de tout mon être, les yeux mouillés, alors qu'une douce voix vint à nouveau vers moi. Il s'agissait de la même femme que tout à l'heure, bien que je ne puisse toujours pas la voir distinctement à cause de mes larmes.

-Je sais qu'on ne se connait pas du tout et que je suis une inconnue pour vous mais vous m'avez l'air très mal en point mademoiselle et je veux juste vous aider. Je ne suis pas une mauvaise personne, promis.

Bien sûr, je la croyais. Personne ne me voulait de mal, je le savais. Pas même ceux qui avaient allumé ces bougies. Ce n'était pas leur faute. Personne ne pouvait savoir quel effet ça aurait sur moi. Si je m'étais éloignée, ce n'était pas par peur d'elle, mais par honte de pleurer ainsi devant tous ces gens. J'acceptais donc avec un sourire son mouchoir et essuyais mes larmes. Je me laissais quelques instants pour retrouver une voix presque calme et pour retrouver la vue à 100%. Je reposais alors mon regard sur l'inconnue.

-Vous... vous êtes... très belle, réussis-je à dire même si ma voix était encore un peu cassée par mes précédents sanglots.

Je pris une bonne inspiration. Ca allait mieux. J'éloignais le plus loin possible de mon esprit toute image de flamme, et je réussis à me calmer peu à peu. Je lui souris à nouveau.

-Je m'appelle Maïlys. Et vous ? Est-ce que... ça vous dérangerait, si on s'éloignait un peu ?

Je craignais de voir débarquer sans prévenir une quelconque personne avec une bougie à la main. Allez savoir, tout était possible. Et si cela venait à arriver, croyez moi que j'allais frôler la crise cardiaque !

Mon interlocutrice parut décontenancée par mes premières paroles. Je souris. J'avais pour habitude de ne jamais me lasser de complimenter les gens, je savais que ça faisait toujours plaisir, et j'aimais donner le sourire aux gens. Sauf que véritablement, ce n'était pas le moment. Il est vrai que nous ne nous connaissions pas, et je venais de lui offrir une belle crise de larmes. Finalement, elle m'indiqua un chemin que nous empruntâmes afin d'être éloigné de la fête. Une fois au calme, on s'assit sur un banc. Elle se présenta, et je pu vraiment savoir qui elle était. A son prénom assez peu ordinaire, je devinais qu'elle était une Déesse. Par Jupiter, une Déesse ! Mais de quelle mythologie ? Quelle était sa fonction ? Du coup, je me sentis quelque peu nerveuse, et intimidée. Si cette personne savait que moi, je n'étais qu'une simple Humaine... Et dire qu'en plus, elle était venu à mon aide !

-Alors ? Que s'est-il passé il y a quelques instants ? Je dois vous avouer que vous m'avez fait un peu peur.

J'hésitais. Si je lui répondais sincèrement, je risquais de la lasser, non ? Elle était une Déesse après tout ! Mais si c'était une personne qui avait pour don de soigner ? Peut-être pourrait-elle soigner mes blessures... je me demandais d'ailleurs si elle avait remarqué mes nombreuses brûlures loin d'être invisibles. Et puis, elle semblait gentille...

-Et bien, je... Je crois que j'ai la phobie du feu. Et, dans la salle... ils ont... allumé tant de bougies...

Rien que d'y repenser, j'eu quelques frissons. Ma vie avait toujours été bouleversée par des incendies, dont un qui avait tué mes parents, et l'autre qui m'avait défiguré.

Cette personne était si douce, si attentionnée, si patiente. Et si tous les Dieux étaient comme elle, pourquoi les autres Humains les avaient-ils exilés ici ? Je lui souris tendrement. J’appréciais déjà beaucoup cette femme, bien que mon frère me reprocherait encore mon manque de prudence envers les inconnus. Je sentis son regard sur moi, et je compris que son esprit faisait le lien entre ce soir et mes brûlures. Mais elle ne semblait pas écoeurée, au contraire, elle semblait encore plus attendrie. Elle me promit alors que ce soir, il n'y aurait plus de f.... f.. feu, et que l'on resterait dans le noir. Elle était vraiment sympas, non ?

-Je vous remercie, mais... je crains de gâcher votre soirée...

Si elle n'avait pas de problèmes avec les bougies, alors oui, je lui gâchais clairement sa soirée. Il vaudrait peut-être mieux que je retourne au camp humain voir mon frère. Qui ne pourrait s'empêcher de me réprimander sur mon escapade nocturne, soit dit en passant.

Puis, elle me posa quelques questions qui me mirent mal à l'aise. Le doute s'installa dans mon esprit. J'lui dit, j'lui dit pas ? Elle semblait gentille, non ? Et puis depuis quelques temps, la rumeur courait que les Divinités étaient au courant pour la présence des Humains. Si mon frère savait ce que je m’apprêtais à faire...

-Et bien, je... Hum... en fait je... je fais parti de ceux qui ont décidé de suivre les êtres surnaturels envoyés sur Néméïl...

Je l'avais dit, sans vraiment le dire. Si elle savait pour les humains, alors elle comprendrait. Sinon, et bien je passerai pour.. je sais pas, une Demi Déesse peut-être ? En tout cas, plutôt fière de moi d'avoir réussi à donner l'information sans vraiment la donner, je lui souris, essuyait mes yeux encore brillants.

Décidément, cette femme était merveilleuse. Elle insista alors sur le fait que, pour elle, la nuit était déjà quelque chose d'important. Je ne connaissais pas bien les Divinités Egyptiennes, donc peut-être était-elle une Déesse rattachée à la lune ? Ouadjet... Non, je n'avais vraiment aucune idée de qui elle était réellement. Mais cela ne retirait en rien le fait que je la trouvais fort sympathique. Je souris donc à sa réponse, avant de lui poser une question:

-Si la nuit est si importante pour vous, c'est parce que vous y êtes rattachée ?

Et, suite à ma réponse quelque peu... détournée, elle parut perplexe. Je compris très vite qu'elle n'avait aucune idée de la présence d'Humains sur l'île. Et pourtant, si les Humains du camp disaient vrai, ceux qui avaient surveillé de loin la soirée qui s'était déroulée il y a peu de temps, un Dieu avait mentionné que des Humains étaient sur Néméïl, révélant ainsi l'information à tout le monde. Elle crut alors que j'étais une Demi Déesse. Je me sentis flattée par ce qu'elle disait mais je me devais de lui dire la vérité. Elle semblait être si gentille que je n'avais aucune raison de me méfier. D'ailleurs, depuis quand est-ce que je me méfie des inconnus, moi ? Je me levais, m'assis sur un banc non loin et attendis qu'elle me rejoigne, avant de lui dire, presque en chuchotant.

-Pour vous, les Humains vous ont exilé ici, et l'histoire s'arrête ici ? En réalité, tous n'étaient pas d'accord avec ça. Chasser les Dieux était, pour certains, une grosse erreur. Ils ont donc choisi de les suivre...

Si Maxence savait ce que j'étais en train de faire...

-Nous sommes en tout douze Humains sur Néméïl. Nous avons établi un camp, protégé par une forêt. Je pensais que vous étiez au courant, étant donné que visiblement, certains nous ont démasqué et ont révélé à tous notre présence sur l'ile.